Commune d’Emerainville
MONOGRAPHIE
1888 – Instituteur BLANCHET
Les monographies communales sont des études portant sur les communes de Seine-et-Marne réalisées par les instituteurs à la demande du Ministère de l’Instruction publique pour la préparation des expositions universelles de 1889 (instruction générale du 31 juillet 1887) et 1900 (instruction générale du 29 décembre 1898).L’exercice avait pour but de célébrer le progrès de l’instruction publique et l’efficacité des instituteurs dans l’enseignement de l’histoire et la géographie, facteur indispensable pour renforcer, au sein de la population française, l’unité nationale, l’attachement à la patrie et l’esprit républicain.
La monographie devait respecter un plan commun, D’abord, une partie géographique et historique (situation géographique, climat, histoire locale, biographies de personnages remarquables, liste des personnalités locales, économie…), une partie consacrée à l’instruction publique.
En 1888 ,Clément BLANCHET alors instituteur rédigea la monographie d’Emerainville pour l’exposition universelle de 1889
Monographie retranscrite dans son intégralité
Document original disponible en numérique aux Archives départementales de Seine et marne sous la côte : 30Z158 – cliquez ici
1er PARTIE
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Notice géographique
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Chapitre I
Emerainville est un petit village de 250 habitants environ, compris dans le canton de Lagny, Arrondissement de Meaux.
Il est situé à 48° 48’ 40’’ de latitude et à 0° 17’ 40’’de latitude Est. Son altitude est de 110m.160
Le territoire de la commune d’Emerainville faisait autrefois partie de l’ancienne Brie française. Il est limité au sud par celui de de Pontault , au nord par ceux de Champs sur Marne , de Lognes et de Noisiel à l’est , par celui de Croissy -beaubourg et à l’ouest par celui de Noisy le Grand. Cette Dernière limite confinée au Département de Seine et Oise.
Son étendue est égale à une surface de 556H. 28A, 30 qui se subdivise ainsi :
Terres labourables…………………………………..……… 372H . 51A , 95
Près…………………………………………………………………………… 30. 09 . 85
Bois………………………………………………………………………… 113. 13 . 80
Jardins potagers……………………………………………………….… 6. 74 .70
Objets d’agéments…………………………………………………..………. 90 .05
Pâtures……………………………………………………………………………. 3.04.00
Friches, mares , marinières………………………………………9h.76A.00
Sol des maisons, bâtts, cours……………………………………..3.68.20
Eglise ,cimetière et chemins……………………………….………16.39.75
Total égal………………556.28.30
Comme le plan l’indique, les deux sections qui forment la commune sont situées, l’une à l’extrémité Est de son territoire, c’est le chef lieu, l’autre à l’extrémité Ouest, c’est le hameau de Malnoue. Elles sont réunies par le chemin de grande communication N° 51 de Brie-Comte-Robert à Champs-sur-Marne et par la route départementale N° 17 qui traverse Malnoue dans son entier.
Emerainville est desservi par le chemin de fer de l’Est et sa station à pour nom Emerainville – Pontault sur les territoires desquels elle est construite.
A la gare d’Emerainville se rattache le chemin de fer industriel des MM Menier fils, qui dessert leur importante usine de Noisiel. C’est par la ligne de l’Est qu’ils font en grande partie leurs expéditions de chocolat, comme aussi qu’ils reçoivent les produits nécessaires à leur industrie, tels que sucre, cacao, houille, bois etc. Leur trafic avec cette compagnie est considérable.
Ce chemin de fer est construit en totalité sur leur propriété, ayant fait dans ce but , il y a 5 ou 6 ans , l’acquisition de la ferme d’Emerainville.
Un seul petit ruisseau important , le Merdereau alimenté par les eaux pluviales et la dérivation des drains , traverse une partie du territoire, aussi est il à sec une grande partie de l’année, il se jette dans la marne en amont de Gournay Seine et oise.
Chapitre II
Le territoire d’Emerainville est situé sur le plateau de la brie , il est plat avec quelques ondulations seulement, sauf à Malnoue où il offre une déclivité assez prononcée surtout à l’extrémité ouest de ce hameau , là existe un petit vallonnement où coule le Merdereau qui traverse à cet endroit la route départementale N° 17.
Le sol est argilo-calcaire, aussi est il froid et assez difficile à travailler. Pour l’amender on a drainé les terres ce qui permet avec une fumure assez forte d’en tirer d’abondants produits car la couche végétale est relativement épaisse surtout à Emerainville.
Le territoire, sauf quelques parcelles, est entre les mains de trois propriétaires, deux exploitent leurs terres au moyen d’un gérant et le troisième à un fermier.
Un mot sur chacune de ces exploitations.
Depuis quelques années il est notoire que la ferme d’Emerainville appartenant à Me Ve Menier et comportant 152 hectares ne produit pas ce quelle pourrait donner et cela tient particulièrement au manque de fumier.
Il n y a pas de vaches, un troupeau de moutons souvent insuffisant, de la pénurie d’engrais et des récoltes laissant à désirer quand, autrefois les fermiers en tiraient des produits abondants et rémunérateurs. Les pailles de la ferme s’en vont chez la propriétaires, de même que la grande partie des fourrages.
Comme compensation, on fait achat d’une infime partie de fumier où on y supplée par des détritus de cacao, voire même de petits copeaux de bois qui servent, à l’heure où j’écris, à faire de la litière aux bœufs et aux chevaux. Si le terrain donne encore des récoltes assez satisfaisantes, c ‘est qu’il naturellement de bonne qualité. Toutefois si la propriétaire ne change pas son mode de procéder, il est à craindre que les récoltes deviennent par la suite médiocres, pour ne pas dire mauvaises.
Quant à la culture proprement dite (je parle de la ferme d’ Emerainville ) elle me semble bien dirigée. Cependant elle ne laisserai rien à désirer si le gérant, qui l’exploite, avait une initiative propre. Au contraire, les ordres lui sont donnés par un régisseur général des propriétés immenses de Me Ve Menier qui , bien qu’ayant des connaissances techniques ne laisse pas cependant de faire des omissions.
Dans cette ferme on utilise les chevaux et les bœufs; les instruments aratoires sont modernes , le battage se fait à la ferme même à l’aide d’une machine fixe mue par les chevaux. L’aménagement des bâtiments est bien disposé et confortable et l’ensemble est fort bien tenu.
L’autre propriété , situé également à Emerainville et appartenant à Me Ve Fréquant, est exploité aussi par la propriétaire et ne compte que 25 hectares cultivables. Là le gérant à toute liberté, le fumier de ferme n’est pas marchandé ni les engrais chimiques pour les prairies naturelles. Les céréales et les plantes sarclées y sont cultivées pour les besoins de la maisons . Néanmoins Me Ve Fréquant fait chaque année une vente assez considérable d’un foin de première qualité.
Il me reste à parler de la ferme de Malnoue appartenant à Me Ve Nelaton. Elle est exploitée depuis trois ans par une veuve. Les terres qui la composent ont une surface de 11 hectares; elle n’ont pas les qualités de celles d’Emerainville. Elles sont assez bien cultivées, mais il y a un outillage incomplet: il manque des chevaux jeunes et vigoureux; dans l’étable il y a assez de vaches desquelles la fermières tire une grande partie de ses bénéfices comme aussi sa basse cour. Un troupeau de moutons assez important complète l’ensemble du bétail.
Les terres de cette ferme sont presque partout entourées de bois , de sorte que le gibier y fait grand dégâts.
Il est en outre regrettable qu’il n’y ait pas une direction plus éclairée et une surveillance au dehors plus active.
Enfin les bâtiments de cette ferme n’offrent pas tout le confortable désirable.
Le sol du territoire de la commune me parait être accessible à toute culture, cependant celle qui prédomine est la culture du froment et de l’avoine.
Peu ou point de seigle, presque jamais d’orge, beaucoup de prairies artificielles formées de luzerne et de trèfle; de la minette pour faire manger en vert, rarement du sainfoin qui se plaît, du reste, plus particulièrement dans un terrain chaud et calcaire.
Comme plantes racines, on cultive la betterave à sucre dans la ferme d’Emerainville ainsi que la betterave fourragère pour les animaux. Dans les autres fermes, c’est la culture de cette dernière qui est préférée comme alimentation du bétail pendant l’hiver. La pomme de terre est cultivée pour les besoins alimentaires des habitants.
J’ai dit plus haut que les pailles et l’excédent des fourrages de la ferme d’ Emerainville étaient envoyés à Noisiel.
Il en est de même que l’excédent de froment qui est utilisé dans les maisons dite de commerce où les ouvriers de l’usine trouvent à des prix réduits, tous les aliments nécessaires. Quelquefois aussi on y expédie des moutons pour la boucherie, mais la plus grande partie de ce bétail s’écoule sur le marché de la villette.
Les produits en blé, paille, foin, etc, des autres fermes sont dirigés sur Paris à l’aide des voitures des agriculteurs.
En outre des propriétaires qui viennent d’être énumérés, il y en a encore quatre autres possédant une ou deux vaches cultivant quelques parcelles de terrain. La vente du lait qu’ils font aux habitants est leur seul produit.
On ne fait dans la commune aucun élevé de bétail.
Le commerce proprement dit est limité à la vent d’épicerie, de vin au détail et d’ustensile de ménage.
En dehors de ces débits, il a au hameau de Malnoue un serrurier mécanicien.
A Emerainville , un coquetier Marchand de volailles
Leur commerce n’est pas considérable.
La majorité des habitants est ouvrière.
2e PARTIE
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Histoire de l’enseignement
Comme il y eut au hameau de Malnoue une abbaye qui disparut en 1790 et sur laquelle je donnerai quelques détails dans l’historique de cette commune, il est présumable qu’on devait s’y occuper d’enseigner les connaissances de ce temps.
Ce qui me confirme dans cette opinion c’est que j ai trouvé, à la date du 9 Août 1741, un mariage d’une toute jeune personne admise dans cette abbaye en qualité de pensionnaire.
Dans tous les cas, cet enseignement, s’il existait, devait être exclusivement réservé à la haute société de ce temps.
En dehors de ce fait, il n’existe rien dans les archives révélant l’existence d’un enseignement quelconque avant 1833, et cela probablement à cause du peu d’importance de la population de la commune d’ Emerainville.
Les anciens rapportent qu’après la révolution, les parents un peu soucieux de faire apprendre quelque chose à leurs enfants les envoyaient dans les communes voisines où il y avait des maîtres d’école.
On arrive ainsi jusqu’en 1833
A cette époque la municipalité loua à Emerainville un local bien exigu et peu éclairé pour recevoir le premier instituteur.
Le mobilier était d’apparence aussi pauvre que le local et consistait en bancs et tables mobiles seulement; aucune carte point d’objets pouvant aider les enfants dans l’exécution de leurs petits travaux.
L’enseignement comprenait: l’enseignement religieux, la lecture, l’écriture et le calcul .On peut dire que ce fut tout le programme suivi jusqu’à la promulgation de la loi de 1867, celle de 1850 n’ayant rien innové à ce sujet. C’ est à la date de 1867 que les cartes géographiques font partie du mobilier scolaire.
Si l’enseignement primaire se donnait sur une échelle aussi restreinte, le traitement des instituteurs de ce temps ne l’était pas moins et encore les contraignait-on à des fonctions accessoires telles que chantre à l’église, sonneur, distributeur d’eau bénite, etc
Voici une réglementation du temps faite au premier instituteur d’ Emerainville datant du 16 juillet 1833.
« La commune met à la disposition de l’instituteur un local pour lui et pour tenir ses classes
2: Il est chargé de sonner l’angélus le matin, à midi et le soir aux heures ordinaires.
3: Il commencera sa classe, en hiver à 8h du matin et en été à 7H jusqu’à 11h, le soir la classe aura lieu de 1H à 3H.
4: La commune lui paiera la somme de 141F
En outre, il percevra des parents
1F par mois pour chaque élève ne sachant pas lire;
1F,50 pour ceux commençant à écrire»
En 1842, le logement était loué 110 F et ce n’est qu‘en 1860 que la commune eut une maison d’école en sa possession.
J’ajouterai que le chauffage a été fourni par les parents jusqu’en 1868.
Le traitement détaillé ci dessus a été établi sur les mêmes bases jusqu’à l’année 1841, époque où il y fut ajouté un supplément de 200F qui fut maintenu par le conseil municipal même après la loi de 1850 qui garantissait le traitement à 600F.
L’amélioration paraissait à cette époque être assez sensible. Elle s’accentua de nouveau en conformité des lois de 1867 et de 1875 pour s’arrêter enfin au traitement actuel fixé par la loi de 1881.
Si il y a marche ascendante dans le traitement, les programmes deviennent également plus étendus: ainsi les font les lois de 1867 et de 1882.
Je termine cet exposé par la liste des instituteurs qui se sont succédé à Emerainville.
1- Brun Robert Pierre………………………………de 1833 à 1836
2- Bécherer Stanislas Dominique………………….de 1836 à 1837
3- Fremin Julien Felix………………………………de 1837 à
4- Magnon…………………………………………………..incertain
5- Louis………………………………………………de
6-Jousse……………………………………………………… à 1858
7-Leduc Achille……………………………………..de 1858 à 1862
8-Brunel Ulysse…………………………………….de 1862 à 1877
9-Blanchet Clément Désiré………………………..de 1877 à…..
3e PARTIE
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1° Histoire de la commune avant la révolution
Avant la révolution notre commune se nommait indifféremment Emery ou Emérainville, ainsi que le font savoir les anciens écrits déposés dans les archives de la mairie. Cependant la première appellation était de préférence employée par les habitants et surtout par les prêtres qui, tous signaient leur nom en le faisant suivre du qualificatif: curé d’Emery.
Emerainville, comme l’indique le plan annexé, a toujours été formé de deux sections.
Afin de donner un peu plus de clarté à mon travail, je parlerai de ces sections séparément, chacune d’elles ayant jusqu’à la révolution une existence pour ainsi dire particulière .
C’est qu’en effet, dans ces temps , la religion par son autorité et son action dirigeante, était la chose prédominante dans la société et il n’y avait alors de vie commune qu’entre les membres du clergé et ceux de la noblesse; pour le peuple soumission absolue à tous les ordres des classes privilégiées. Cela se sent, se voit dans la forme même dont sont rédigés tous les actes civils d’alors, il en exhale comme un souffle de suprême autorité.
Donc, là où il y avait un représentant du clergé là,les habitants étaient soumis aux mêmes règles, aux mêmes préceptes et presque sans rapports sociaux avec le dehors. C’est ce qui existait ici, car Emerainville avait son curé et Malnoue, succursale d’Emerainville avait aussi le sien.
Maintenant si je me reporte par la pensée à plus de deux cents ans en arrière, je vois qu’Emerainville était composé d’un château et de quelques habitations, dont la plus importante était le presbytère. Le château rappelait encore la féodalité par ses murs épais, ses tourelles et ses fossés. Ses dernières dépendances ont disparu il y a à peu près 30 ans, cependant on voit encore les soubassements de l’aile gauche et les fossés, sauf la partie nord qui est comblée.
Rien ne révèle le nom du châtelain antérieurement à 1640, mais cette époque il avait pour propriétaire un M Le Camus dont les restes d’un de ses descendant ont été déposés dans l’église d’Emerainville sous une pierre tombale portant textuellement l’épitaphe suivante :
Ycy repose messire Denis Le Camus ,chevalier, seigneur d’Hemery Coucerain et Malnoue, conseiller du roy en ses conseils, président de la cour des aydes, décédé le 9 janvier 1688, agé de 51 ans, lequel par son testament reçu par Despriès et son compagnon notaires au Chastelet de Paris le 29 décembre 1687, a fondé un chappellain pour célébrer à perpétuité une messe basse qui se dira les festes et dimanches en cette église et les autres jours dans la chappelle du château de ce lieu, le tout aux conditions portées par l’acte du dernier janvier 1688 passé en exécution dudit testament entre Mre Antoine Turgot maistre des requêtes exécuteur d’iceluy et de Me André Le Camus, conseiller au parlement de Mets, son frère.
« Priés pour son ame »
Il est présumable que propriété resta entre les mains de la même famille jusque vers vers 1780.
Puis vient M Dulau en 1780 ou 1782 qui maria sa fille au comte D’Elva.
En 1785 la propriété tombe au seigneur François Alexandre de Polignac, seigneur d’Emery Courcerain et de Pontault et de la moitié par indivis de Malnoue, Colonel de cavalerie, mariée à la dame Françoise Elisabeth Feyderbe de Modave.
Tout le territoire d’Emerainville, plus le climat qui porte encore le nom de vallée de Courcerain ou il devait y avoir quelque habitation, car l’existence en a été révélée par des restes de maçonnerie trouvés dans le sol, devant donc appartenir au châtelain d’ Emerainville.
La division a du s’opérer pour passer:
1° Le château et le parc entre les mains , par acquisition, Des ascendants de Me Ve Fréquant, actuellement propriétaire.
2° L’autre partie , en fermage acquise également aux ascendants de Mrde Montesquiou qui l’a revendue à Me Ve Meunier qui la possède encore.
Maintenant, quel devait être à notre époque l’aspect de notre commune?
Si on consulte les anciens plans terriers on voit que le seigneur jouissait de tout le confortable désirable: grande habitation avec dépendances; domaines considérables sillonnés d’allées larges bien ombragées; des bois où il trouvait les plaisirs de la chasse comme aussi d’agrémenter ses repas de pièces de gibier des plus variées. En un mot il jouissait de tout le bien être, de toute la puissance, de tous les honneurs que lui avait légués sa naissance.
Le Prêtre venait ensuite avec l’autorité que lui donnaient les connaissances qu’il possédait et la suprématie du caractère qu’il tenait de sa mission. Au milieu d’un peuple ignorant, souvent crédule, on comprend qu’il pouvait user de ses privilèges.
Le paysan devait avoir lui, une humble chaumière où venait s’abriter contre les intempéries une famille quelquefois nombreuses toujours misérable. Pour sa circulation quelques chemins boueux, le plus souvent impraticables, des cloaques infects où il prenait le germe de maladies qui le rongeaient et l’emportaient.
Mais je m’arrête la sur ce sujet, n’ayant pas à faire, nime le pouvant du reste, histoire de la société d’alors.
Hameau de Malnoue
Je dirai maintenant ce que fut le hameau de Malnoue avant la révolution, et terminerai ce petit résumé par les faits saillants datant de l‘émancipation du peuple jusqu’à nos jours.
On a vu plus haut que Mr de Polignac, en outre d’ Emerainville et de Courcerain, possédait encore la moitié de Malnoue.
Ce hameau dépendait donc en partie de la moitié d’ Emerainville, l’autre devait une possession du clergé ou peut être encore un don fait par le roi à quelques personnes de famille Nobiliaire.
Quoiqu’il en soit , il y avait là , dans le parc actuel une abbaye royale fondée avant 1630. En 1880, il restait encore un reste de la chapelle que fit disparaître le châtelain. On y trouva plusieurs pierres tombales qui furent employées dans de nouvelles constructions.
Une vieille tour, qui sert aujourd’hui de colombier, a été épargnée. A part cet édifice de peu d’importance, il ne subsiste rien pouvant donner une idée de ce que fut la construction. Cependant l’emplacement de cette abbaye était bien choisi et le qui y était rattaché pouvait fournir largement à ses besoins d’existence.
Cette abbaye, faisant l’office de pensionnat comme on le verra dans l’extrait de mariage ci-après, devait aussi recevoir des religieuses cloîtrées, car on trouve à la date du 28 avril 1748, un acte d’inhumation de la Neè Maussant qualifiée d’ancienne tourière des dames religieuses de l’abbaye de Malnoue. On sait que les tourières de ces établissements avaient pour mission de faire parvenir aux religieuses au moyen d’un tour, tout ce dont elle avait besoin et de façon que les dites religieuses ne puissent voir figure humaine.
Cet établissement avait un chapelain, cependant sur la demande de l’abbesse, le curé d’ Emerainville pouvait célébrer les mariages et autres cérémonies dans la chapelle de l’abbaye.
Voici à ce sujet l’extrait dont j’ai parlé, il justifie l’existence d’un pensionnat et nous fait voir aussi que la précocité pour le goût du mariage existait déjà chez nos ancêtres.
« L’an mil sept cent quarante un le 9e jour d’août après publication faite de deux bans tous dans notre église paroissiale que dans celle de Malnoue, dont le premier a été publié le six et le second le dix août et dans la paroisse de St Germain l’Auxerrois comme il nous a apparut par le certificat du vicaire de St Germain le six août sans aucun empêchement et la dispense des autres bans de Monseigneur l’archevêque de Paris du 7 août 1741, signé Vegnand official et (quelques mots illisibles) après les fiançailles dans l’église de l’abbaye royale de Malnoue ce 12 du présent mois à huit heures du soir ont été marié le 13 par nous? Jacques Leberroyer curé d’Emery du consentement de Me Jeanne Françoise Rossignol abbesse de la dite abbaye de Malnoue, en l’église de la dite abbaye et à la prière du consentement de M l’abbé de Burle, confesseur de la dite abbaye, faisant ordinairement les fonctions curiales dans l’enceinte de la dite abbaye et ont reçu de nous la bénédiction nuptiale le sr Jean Quane, fils mineur âgé de 17 ans , fils de Sr Richard Quane banquier à Paris et demoiselle Marie Oreilly ses pères et mères; et demoiselle Deodata Roach, agée de 14 ans ou environ, fille de défunt Jean Roach officier de la compagnie des indes d’ Angleterre et de Marie Anne Raumorth . La dite demoiselle Pensionnaire dans la dite abbaye assistée de Edmond Bingley, gentilhomme anglais demeurant à Paris, grande rue faubourg st honoré, paroisse de la madeleine ( un mot illisible) l’evêque a ce présent et au nom et comme fondé de la procuration spéciale ou tout autre chose a l’effet des présentes passée le deux du présent mois d’août devant Tournois , notaire à Paris qui en a gardé la minute et son collègue: ladite procuration donnée par messire Jacques Buteler, écuyer ordinaire de sa Majesté, demeurant à Paris aux écuries du roi, rue St honoré, paroisse St Germain l’Auxerrois, au nom et comme tuteur de la dite Deodata Roach, par sentence rendue en la prévôté de Malnoue -en-Brie.Le premier du présent mois d’août, et encore ledit Sr Buteler autorisé par la dite sentence à assister à la célébration dudit mariage, laquelle charge de tuteur le Sr Buteler accepté par acte du même jour. Ensuite de la dite sentence dont une expédition a été déposée pour minute à Tournois , notaire à Paris, par le dit Sr Buteler, le 10 présent mois d’Août , en présence du Sr vieillard Quane, père dudit jean quane, de dame Marie Oreilly, mère dudit Sr Jean Quane, de Demoiselle Anasthasie Quane, sœur dudit Jean quanedom André Omalloron ( un mot illisible) et de demoiselle Marguerite Maenermara , parents de la dite épouse et encore lesdits époux assixtés d’Edouar Markhan interprété du roi, demeurant rue de bonne paroisse St Sulpice et de Jean Comerford, négociant à Londres, Thomas Buteler, rue St Nicaise, paroisse St germainl’Auxerrois, maître Guillaume Briguet chapelains de cette abbaye, amis tant de l’époux que de l’épouse qui ont signé avec nous les présentes et les dits novices.»
A l’angle nord est du parc de l’abbaye se trouvait une toute petite chapelle dédié à St Eraste
Les anciens racontent qu’on allait invoquer ce saint pour la guérison de toutes infirmités ou maladies . Ils ne disent pas s’il y eut des miracles, mais c’est fort probable. Cette chapelle ne disparut entièrement qu’en 1870 comme aussi les pèlerinages bien entendu.
L’abbaye exista jusqu’en 1790.
Voici maintenant comment eut lieu tout d’abord le partage de sa propriété.
Invoquant le décret du 2 novembre 1789, qui avait dessaisi le clergé de ses biens , quelques habitants de Malnoue s’étaient emparés d’une pièce de terre des 35 hectares comme bien communal.
Mais en 1792 Mr de Marboeuf se rendit adjudicataire de la ferme de l’abbaye au district de Meaux. Dans ces temps de trouble s’occupa-t-il de rattacher les 35 hectares en question à son domaine?. On l’ignore.
Ce que l ‘on sait , c’est que Mr et Me Marboeuf morts, leurs héritiers en ont revendiqué la possession qui leur fut octroyée par arrêté du conseil de préfecture en date du 23 fructidor an 13, et confirmé par la secrétaire d’état du 23 septembre 1806.
Ainsi se reforma cette propriété un moment divisée.
Suivent les propriétaires connus qui en ont eu la jouissance .
Me de Brevanne et ses descendants qui en firent leur maison de campagne.
Puis vient Mr Nelaton célèbre médecin qui fut appelé à donner ses soins à l’empereur napoléon III. Il fit démolir l’ancienne maison et construisit un superbe château. Sa veuve ne conservera pas cette somptueuse demeure , elle la vendit aux banquiers Duval et Gendry avec le parc el le bois contigu , ne gardant que la ferme dont elle est encore propriétaire.
Par suite de mauvaises affaires Mr Duval et Gendry durent voir vendre leur château qui fut acquis par M Ve Menier qui le détient encore actuellement.
Enfin , ai-je besoin de dire quelque chose sur l’existence des habitants du hameau de Malnoue avant la révolution? Cela me paraît inutile, car elle n’était différente ni de celle des habitants d’Emerainville ni de celle des autres manants de la France.
La commune d’Emerainville après la révolution
Un mot maintenant touchant l’histoire d’Emerainville et de son hameau après la révolution.
Par le fait que j’ai signalé plus haut relatif à la prise de possession de 35 hectares dépendant de la ferme de l’abbaye par plusieurs habitants de Malnoue, on peut considérer cet acte comme la conséquence d’un mécontentement envers les classes privilégiées et de l’émancipation du peuple. Liberté sans aucun doute exagérée mais qui, à la rigueur pourrait être excusée par les sévices et la tyrannie qui pesaient depuis si longtemps sur la dernière classe de la société, quoiqu’il en soit , si l’acte est blâmable, il est un signe manifeste que nos pères avaient à cette époque secoué le joug de l’esclavage pour devenir des hommes libres et égaux devant la loi.
Que vont ils faire de cette liberté qui leur est si chère?
Les jours de trouble passés et le calme revenu dans leur esprit, leur ressentiment n’est pas de longue durée.
La terre a besoin de bras, le propriétaire lui aussi a besoin d’argent.
Alors après entente, ils vont prendre cette fois leurs outils affranchis et se mettre avec ardeur à creuser les sillons qui doivent leur apporte le bien être.
Qu’on a du plaisir à se reporter à cette époque et de considérer cette société dans son état natif pour ainsi dire!
Au milieu de ce labeur libre, s’organise la municipalité qui va veiller à l’intérêt des habitants et de la commune.
Le prêtre reprend cette fois ces vrais fonctions.
Chacun enfin va vivre dans sa sphère propre.
Alors la commune d’Emerainville prend un autre aspect, ses chemins sont entretenus, les rapports entre les deux sections deviennent plus intimes et leurs habitants vont dorénavant vivre en communion d’idées et de sentiments.
Ils s’entendent dés lors pour travailler au bien commun: L’instruction est donné aux enfants: à l’aide de sacrifices et des secours de l’état, ils ouvrent un chemin de grande communication; ils construisent une école à Emerainville.
Puis une ligne de chemin de fer vient traverser leur territoire, ce qui donne à leur commune une vie plus active et une importance inconnue jusqu’à ce jour.
Poussée enfin par la marche du progrès la municipalité crée une école au hameau de Malnoue afin d’assurer l’instruction à tous les enfants; bienfait dû à la république qui fait de nos jours briller le flambeau des lumières et de la liberté, réalisant ainsi l’oeuvre que son aînée lui a léguée.